Pour quelle raison 16 2/3 Hz ?
La fréquence de 16 2/3 Hz (ou 16,7 Hz) utilisée pour l’alimentation électrique des trains en Allemagne, en Suisse et en Autriche trouve son origine dans des choix historiques et techniques liés à l’électrification ferroviaire.
Raisons historiques et techniques du choix de 16 2/3 Hz
- Origine historique : Ce choix remonte aux premières électrifications ferroviaires dans ces pays, au début du XXe siècle. À cette époque, la fréquence standard du réseau électrique industriel était de 50 Hz, mais pour la traction ferroviaire, une fréquence plus basse a été adoptée pour des raisons techniques.
Avantages techniques d’une fréquence basse :
Une fréquence plus basse réduit les pertes dues à l’effet de peau dans les conducteurs, notamment les rails, ce qui diminue la résistance et donc les pertes énergétiques lors du transport du courant électrique.
Elle limite aussi la chute de tension liée à l’inductance des lignes électriques, ce qui est important sur les longues distances des réseaux ferroviaires.
Le courant alternatif monophasé à basse fréquence (16 2/3 Hz) est plus proche du courant continu en termes de comportement moteur, ce qui facilite la conception et le fonctionnement des moteurs de traction.
Compatibilité avec la récupération d’énergie : Le système à 16 2/3 Hz permettait plus facilement la mise en œuvre du freinage par récupération d’énergie, où les moteurs de traction deviennent générateurs lors du freinage et renvoient de l’électricité dans la caténaire pour être utilisée par d’autres trains. Cette technologie était plus simple à réaliser avec cette fréquence basse qu’avec le 50 Hz classique.
Production électrique adaptée : Les centrales hydrauliques et thermiques utilisées à l’époque dans ces pays produisaient naturellement une fréquence plus basse (par exemple 1000 tours/minute pour les turbines, au lieu de 3000 tours/minute pour 50 Hz), ce qui facilitait la génération directe de cette fréquence sans réducteurs complexes.
Conséquences et contraintes
Ce choix impose la création d’un réseau électrique spécifique pour la traction ferroviaire, distinct du réseau industriel classique à 50 Hz, ce qui engendre des coûts et une complexité supplémentaire.
La fréquence a été légèrement ajustée de 16 2/3 Hz à 16,7 Hz pour des raisons de tenue du matériel et de normalisation.
Cette fréquence est devenue une « fréquence spéciale » propre aux chemins de fer de ces pays, et oblige les matériels roulants à être conçus spécifiquement pour ce système.
Synthèse
La fréquence de 16 2/3 Hz a été choisie pour les trains en Allemagne, Suisse et Autriche car elle offre un compromis technique favorable à l’époque de l’électrification ferroviaire : réduction des pertes électriques, meilleure compatibilité avec les moteurs de traction et la récupération d’énergie, ainsi qu’une production électrique adaptée aux centrales existantes. Ce choix historique perdure aujourd’hui malgré les contraintes liées à la gestion d’un réseau électrique spécifique au ferroviaire.
Les avantages du courant à 16 2/3 Hz (ou 16,7 Hz) par rapport au courant à 50 Hz pour l’alimentation des trains reposent principalement sur des considérations techniques liées à la traction ferroviaire et à la gestion de l’énergie :
À fréquence plus basse, la chute de tension due à l’inductance des lignes est moindre, ce qui est un avantage pour les longues distances des réseaux ferroviaires. De plus, l’effet de peau (phénomène où le courant circule principalement en surface des conducteurs) est réduit, diminuant ainsi les pertes électriques dans les rails et les câbles.
Plus la fréquence est élevée, plus les tensions entre les lames des commutateurs augmentent, ce qui accroît les pertes fer (hystérésis et courants de Foucault) dans les machines électriques. À 16 2/3 Hz, ces effets sont réduits, ce qui améliore la durabilité et la fiabilité des équipements de traction.
Le courant monophasé à basse fréquence est plus proche du courant continu en termes de comportement moteur, ce qui facilite la conception des moteurs de traction. Ce système permet aussi une mise en œuvre plus simple du freinage par récupération, où l’énergie cinétique du train est transformée en énergie électrique renvoyée dans la caténaire pour être utilisée par d’autres trains. Cette technologie était plus difficile à réaliser avec du 50 Hz.
Historiquement, les centrales hydrauliques et thermiques dans ces pays tournaient à des vitesses de rotation (par exemple 1000 tours/min) qui correspondaient naturellement à une fréquence plus basse (16 2/3 Hz) sans nécessiter de réducteurs complexes
Les convertisseurs modernes pour le réseau ferroviaire à 16 2/3 Hz utilisent des topologies multiniveaux et des filtres spécifiques pour minimiser les harmoniques et les pertes, ce qui optimise la qualité de la tension fournie aux trains.
En résumé, la fréquence de 16 2/3 Hz offre un compromis technique favorable pour la traction ferroviaire, avec une réduction des pertes électriques, une meilleure tenue des équipements, une facilité pour le freinage par récupération et une adaptation historique aux moyens de production électrique. Ces avantages expliquent pourquoi certains réseaux ferroviaires européens ont conservé cette fréquence spécifique malgré la généralisation mondiale du 50 Hz.
Comment la fréquence de 16 2/3 Hz impacte-t-elle les pertes en conduction et en commutation
La fréquence de 16 2/3 Hz (16,7 Hz) influence les pertes en conduction et en commutation dans les systèmes ferroviaires de plusieurs manières, en tirant parti des avantages techniques liés à cette fréquence basse :
Impact sur les pertes en conduction
Réduction de l’effet de peau :
À 16,7 Hz, l’effet de peau (concentration du courant en surface des conducteurs) est moins marqué qu’à 50 Hz. Cela diminue la résistance effective des rails et des câbles, réduisant les pertes par effet Joule.
Diminution des pertes inductives :
La chute de tension due à l’inductance des lignes est proportionnelle à la fréquence. Une fréquence basse limite ces pertes, notamment sur les longues distances des réseaux ferroviaires.
Optimisation des pertes fer dans les transformateurs et moteurs :
Les pertes par hysteresis et courants de Foucault dans les noyaux magnétiques (transformateurs, moteurs) sont réduites à fréquence plus basse, améliorant l’efficacité énergétique.
Impact sur les pertes en commutation
Utilisation de convertisseurs multiniveaux :
Les convertisseurs modernes (comme ceux d’ABB) exploitent des topologies à 3 niveaux ou plus, permettant une fréquence de commutation plus basse tout en minimisant les harmoniques. Cela réduit les pertes liées aux transitions des semi-conducteurs (IGCT, IEGT).
Stratégie de modulation optimisée :
La modulation des convertisseurs à 16 2/3 Hz utilise des harmoniques de rang supérieur (ex : n=12k±1n=12k±1) pour annuler certains harmoniques résiduels, limitant le besoin de filtres actifs et réduisant les pertes associées.
Gestion du bus CC :
Le bus CC intègre des filtres passe-haut (33,4 Hz) et des condensateurs pour absorber les fluctuations de puissance et les harmoniques, réduisant les pertes parasites dans les composants électroniques.
Cette fréquence basse permet un compromis entre efficacité énergétique, durabilité des équipements et complexité des convertisseurs, expliquant son maintien dans les réseaux ferroviaires historiques malgré la généralisation du 50 Hz.
C’est quoi le bus CC ?
Le bus CC (pour bus courant continu) est une barre conductrice commune qui relie plusieurs convertisseurs électriques dans une station de conversion d’énergie ferroviaire. Il joue un rôle central dans la gestion et la distribution de l’énergie entre les différents modules convertisseurs qui assurent la transformation de l’électricité du réseau général (souvent en 50 Hz) vers la fréquence spécifique du réseau ferroviaire (par exemple 16 2/3 Hz).
Il intègre une batterie de condensateurs à couplage direct qui permet de stocker temporairement l’énergie, facilitant la gestion des fluctuations de puissance et améliorant la stabilité du système.
Le bus CC est équipé de filtres, notamment un filtre à 33,4 Hz pour absorber les fluctuations de puissance spécifiques au réseau ferroviaire, ainsi qu’un filtre passe-haut pour éliminer les harmoniques de fréquence plus élevée (notamment de rangs 3 et 5), ce qui protège le matériel et garantit une alimentation plus propre.
Il sert de point de connexion centralisé pour tous les modules convertisseurs, assurant la circulation efficace de l’énergie entre le réseau d’alimentation principal et le réseau ferroviaire.
Dans une station de conversion, le bus CC relie :
- Les convertisseurs côté 50 Hz (réseau général)
- Les convertisseurs côté 16 2/3 Hz (réseau ferroviaire)
- Les équipements de filtrage et de stockage (condensateurs, filtres)
- Les dispositifs de mesure et de protection (mise à la terre, limiteur de tension)
Le bus CC est donc un élément clé des stations de conversion ferroviaires, permettant d’assurer la stabilité, la qualité et la sécurité de l’alimentation électrique des trains, tout en optimisant la gestion des flux d’énergie entre différentes fréquences et différents réseaux électriques.Quels sont les impacts environnementaux de l’utilisation du 16 2/3
L’utilisation du courant à 16 2/3 Hz pour l’alimentation des trains engendre principalement des impacts environnementaux liés aux champs électromagnétiques (CEM) de basse fréquence, comparables à ceux du 50 Hz, mais avec quelques particularités dues à la fréquence plus basse.
Les lignes ferroviaires à 16,7 Hz génèrent des champs magnétiques alternatifs qui traversent facilement les matériaux et le corps humain. Toutefois, les valeurs limites d’immissions (par exemple, 100 microteslas en Suisse) sont fixées pour exclure tout risque avéré pour la santé. À ce jour, aucune preuve scientifique n’a établi d’effets sanitaires pour des expositions faibles et prolongées en dessous de ces seuils.
Les études sur les basses fréquences (y compris 16,7 Hz) n’ont pas démontré de lien causal entre l’exposition à ces champs et des symptômes tels que troubles du sommeil, maux de tête, ou électrosensibilité. Des effets sur le système nerveux central ont été observés à des niveaux d’exposition très élevés (≥ 100 µT), mais ces situations sont rares dans l’environnement ferroviaire. Le risque de leucémie infantile ou d’autres maladies graves reste hypothétique et non confirmé pour les fréquences basses, y compris le 16,7 Hz.
Les effets biologiques connus du 50 Hz (utilisé pour le transport d’électricité domestique) sont similaires à ceux attendus pour le 16,7 Hz, du fait de la proximité des fréquences. Les recommandations et valeurs limites tiennent compte de ces similitudes.
Les rapports d’impact environnemental considèrent aussi les effets sur les écosystèmes, mais aucune spécificité notable n’est attribuée à la fréquence de 16,7 Hz par rapport à d’autres fréquences basses. Les principaux impacts restent liés à l’occupation du sol, la fragmentation des habitats et l’effet visuel des infrastructures ferroviaires plutôt qu’à la fréquence elle-même.
Le bruit généré par les installations ferroviaires n’est pas directement lié à la fréquence de 16,7 Hz, mais plutôt au fonctionnement mécanique et à la circulation des trains.
Les champs électromagnétiques générés par le 16 2/3 Hz sont considérés comme relativement inoffensifs aux niveaux d’exposition rencontrés dans l’environnement ferroviaire, avec des valeurs limites réglementaires conçues pour protéger la santé publique.
Les incertitudes subsistent pour les expositions de très longue durée à des niveaux élevés, mais aucune preuve solide n’existe à ce jour d’un risque spécifique lié à cette fréquence.
Les principaux impacts environnementaux du 16,7 Hz sont donc similaires à ceux des autres basses fréquences, sans spécificité notable, et restent bien encadrés par la réglementation.
En conclusion, l’utilisation du 16 2/3 Hz pour les trains n’entraîne pas d’impact environnemental ou sanitaire distinct ou supérieur à celui des autres fréquences basses utilisées dans le transport d’électricité, sous réserve du respect des normes d’exposition en vigueur.
Jean-Pierre Broillet, Microclub, mai 2025